Bulletin de la Banque de France

Le suivi économique en période de Covid-19 : l’apport d’indicateurs à haute fréquence

Mise en ligne le 7 Octobre 2020
Auteurs : Jean-Charles Bricongne, Jérôme Coffinet, Baptiste Meunier, Michel Mouliom, Jean-Brieux Delbos, Jean-Noël Kien, Vojtech Kaiser, Ariane Lestrade, Étienne Kintzler, Théo Nicolas

Bulletin n°231, article 5. La crise de la Covid 19 constitue non seulement un choc sanitaire mais aussi une rupture économique et sociale majeure et brutale. Les mesures usuelles de suivi économique, fondées sur les statistiques monétaires, financières et d’entreprises, trimestrielles ou mensuelles, ont pu être complétées par des indicateurs alternatifs issus de données dites ≪ ouvertes ≫ (pollution, consommation d’électricité, Google Trends, Twitter). Cet apport a permis d’évaluer la confiance des ménages, ainsi que de mesurer leurs comportements nouveaux et l’impact économique du choc, notamment lorsque les données officielles n’étaient pas disponibles. Dans le cadre du suivi de la crise de la Covid 19, et notamment du confinement, la Banque de France a conçu des tableaux de bord réguliers qui rassemblent les indicateurs issus des données ouvertes. Cet article propose d’en présenter les principaux.

Image Mobilité en France d'après les indices Google Mobility Description Le graphique présente la mobilité en France d'après les indices Google Mobility en 2020 (en pourcentage par rapport à la période de référence = moyenne du 3 au 6 février 2020, moyenne mobile sur 7 jours). Sources : Google Mobility Covid-129 reports, OAG Aviation Limited, World Air Quality Index, Google Trends, Inside Airbnb, calculs des auteurs. Chiffres clés : -85% : la baisse de mobilité en France au début du confinement par rapport à une période normale. -92% : la baisse de trafic aérien en France à mi-avril 2020 par rapport à la même période en 2019. 35% : la part moyenne des tweets des plus grandes entreprises mentionnant la Covid-19 entre fin avril et début mai 2020. 83% : la part des ménages français se déclarant inquiets sur le coronavirus fin mai 2020.

La crise de la Covid‑19, du fait de sa brutalité, de sa soudaineté et de son caractère protéiforme, a provoqué des mouvements inédits dans l’activité économique et le comportement des ménages. Pour les analyser avec rapidité, les institutions comme la Banque de France ont recouru aux données à haute fréquence – c’est‑à‑dire à publication hebdomadaire ou journalière. Ces données ont permis de pallier les délais de publication parfois longs des statistiques officielles, et ainsi de mesurer rapidement l’impact du choc sur l’activité économique. Elles ont aussi contribué à apporter un éclairage en temps réel sur les inquiétudes, les comportements et les anticipations des ménages et à cerner leurs préoccupations et celles des entreprises. La Banque de France, dans sa mission de service public, a ainsi pu adapter ses réponses aux attentes des ménages et des entreprises, que ce soit en vue de l’accompagnement des ménages surendettés ou dans le cadre de sa mission de médiation du crédit auprès des entreprises. Cet article présente une sélection de ces indicateurs, en mettant particulièrement l’accent sur le comportement des ménages et sur le suivi de la conjoncture internationale.

1. La Covid‑19 : une source d’inquiétude croissante pour les internautes

Le coronavirus, un sujet qui fait beaucoup parler de lui sur Internet

Eu égard au caractère massif et non anticipé de la crise sanitaire, le suivi de l’attention portée par les internautes au sujet du coronavirus constitue une information cruciale pour comprendre le degré d’inquiétude et de confiance des ménages, et ce faisant, leurs comportements économiques, notamment de consommation.

L’historique des recherches Google du mot‑clé coronavirus et de ses dérivés (covid, covid‑19) à travers le monde met en évidence un bond des requêtes des internautes en Chine dès la fin janvier 2020, en Corée du Sud et en Italie fin février, et dans les autres pays à partir de la mi‑mars. La méconnaissance du virus a d’abord généré des comportements d’apprentissage très prononcés de la part des ménages. Après un plateau général atteint fin mars, et qui dure jusqu’à la première semaine d’avril, le sujet perd progressivement en intensité relative (cf. graphique 1). Il convient de noter que les niveaux par pays ne sont pas comparables (cf. encadre).

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